Au départ, j'aurais vraiment pu croire que cette journée serait parfaite. Je m'étais levé heureux. J'avais mangé et promené Xander très tôt ce matin et j'avais pu profiter de la rosée matinale. J'avais même pu sentir le soleil se lever. Après avoir pris mon petit déjeuner au Kingsburry, je m'étais mis en tête d'aller faire un tour sur la Gildong's Promenade, de m'assoir sur l'un des banc et jouer un petit air de violon, et vous savez quoi ? Et bien je n'aurais pas dû. Oh non ! Si j'avais su, je serais rentré tout de suite après mon petit déjeuner en attendant sagement que mon agent vienne me chercher avec son éternelle bonne humeur afin d'aller prendre mon fichu avion et partir pour la France. Mais non ! J'avais eu envie de faire le bourge hippie et de faire profiter la nature de mon savoir-faire musical. Et bien sûr...je l'ai regretté. Très amèrement.

Alors que je marchais tranquillement, mon bâton d'aveugle dans la main gauche et mon violon dans la main droite, je fus percuté par une chose non identifiée, sortie de nulle part. Avant même de toucher le sol, je savais ce qui allait se passer. Je savais qu'il allait se casser. Et c'est bien évidemment ce qui s'est passé.
Pour la première fois depuis douze ans, je me suis mis en colère... et j'ai hurlé...

« Mais bordel !!! Vous ne pouvez pas faire attention ?! C'est quoi votre problème ?! Est-ce que vous connaissez le prix de violon ?! Je suis certain qu'il coûte dix fois plus cher que la peau de votre cul d'empoté ! »

Ça ne pouvait pas être un homme. Non. C'était beaucoup plus petit et beaucoup plus bougeant. J'eus raison quand j'entendis la voix de celle-ci. Cette voix qui appartenait à la personne qui venait de détruire l'instrument avec lequel je devais jouer à Paris. Une voix qui devint vite insupportable pour moi en cet instant.

Pendant la collision, j'avais aussi perdu mon bâton. Je tâtonnais le sol à la recherche de celui-ci lorsque j'entendis un autre bruit, un craquement, qui allait sans doute réussir à me faire sortir de mes gonds une bonne fois pour toute.

Cette vielle habitude, je ne peux pas vous dire depuis quand je la traine, mais depuis que j'ai retrouvé ma mémoire, je cours tous les matins - ou les soirs selon les jours. Le matin, c'est plutôt agréable : il n'y avait personne pour vous déranger, pour occuper les voie cyclables et vous couper dans votre élan. Il suffit donc juste de se mettre en tenue de combat, de se munir d'écouteurs ou de casque, de mettre en route la petite playlist créée qui regroupe toutes les chansons motivantes de l'ipod et de partir. Les chansons défilent donc au fil de ma course. Je me perds le long de l'eau, prends des petits sentiers un peu perdu dans la nature, alternant des périodes de courses plus ou moins rapides et des périodes de marches. Je ne savais pas à quelle heure j'étais partie, peu être un peu avant l'aube. On me disait souvent de faire attention, que ce n'était pas sûr de sortir seule à cette heure là. Mais ces avertissements passaient pas une oreille et sortaient bien évidement par l'autre sans vraiment avoir laissé une quelconque traces à l'intérieur de ma tête. La course, c'était pas mal de chose depuis que j'étais sortie de l'hôpital. Je retrouvais un combat, celui d'arriver jusqu'au bout d'une certaine distance, ou d'un certain temps. Un combat qui demandait plus ou moins d'endurance selon l'objectif que je me fixais. Je retrouvais un lutte entre mon esprit et mon corps, je cherchais à maîtriser ce dernier. La course, c'était aussi un moyen de respirer. On se sent tellement bien après avoir couru. On arrive à respirer, on se sent plus léger, peut être même plus libre.

Ce matin, j'avais fait un très beau record. J'étais plutôt fière de moi car j'avais tenu plus de temps que d'autres fois. Sauf que voilà, alors que faisais ma dernière ligne droite, une maison accrocha mon regard et... Je fonçai dans quelqu'un. Un jeune homme, grand, brun, simple. Je n'entendis pas tout ce qu'il me dit, étant donné que j'avais mon sacque sur les oreilles, mais il n'était pas très content. Je lui rendis une canne, un bâton qu'il avait l'air de chercher« Tenez, votre bâton. Je suis désolée. » , avant de me rendre compte qu'il était muni d'un instrument qui avait surement reçu lors de la collision. « Il-Il est cassé ? » m'affolai-je.

Ce n'était pas possible. J'allais me faire tuer à tous les coups ! Ce violon m'était tellement précieux et peut-être l'était-il encore plus mon secrétaire personnel étant donné que c'était grâce à cet instrument qu'il allait être payé. Pourquoi fallait-il que ce soit un récital de cordes et non pas de piano ? Je tâtais l'instrument. Il semblait vraiment en mauvais état mais j'espérais tout de même qu'il pouvait être encore réparé.
Je soupirais lorsque la jeune fille parla. "Tenez" ? Tenez quoi ? Où ? Lequel de nous deux était aveugle ? N'avait-elle pas remarqué la couleur du bâton ? Ne se doutait-elle pas de son usage ? Cette situation me mettais hors de moi.

« Non enfin... il n'est pas cassé ! Il a évolué comme un putain de pokémon ! »

Je me relevais avec précaution et serrai le violon contre mon torse. J'étais fichu... Pire même. Et il fallait que je rentre. Mais sans mon bâton, cela allait être difficile... j'allais devoir appeler à l'aide cette fois.
Je me repérais à la respiration de la jeune femme et lui donnais mon dos. Il suffisait de faire preuve de logique et de calme. Je n'avais qu'à marcher lentement jusqu'à la zone centrale. En partant, je n'avais pas pensé à prendre le téléphone. J'aurais dû emmener Xander avec moi.

« Merde, merde, merde et merde ! »

Tout en marchant, je guettais les mouvements de jeune femme. Elle me suivait la garce ! Qu'allait-elle faire maintenant ? Me casser quelque chose ? Je m'arrêtais net en imaginant le pire. Mieux valait lui demander ce qu'elle voulait avant de subir une autre catastrophe naturelle.

Je me retournais vers elle et fronçait les sourcils.

« Quoi ? Tu veux un truc ? Me casser le poignet ? Me bousculer dans l'eau Haeundae ? Me faire dévaler la pente de la montagne ? Quoi ?! »

Je ne cernais pas totalement la situation. Faut dire qu'il me fallait toujours un petit temps d'adaptation afin de revenir au monde réel et quitter celui des rêves, des pensées. La rêverie me tuera un jour, j'en suis certaine... En tout cas, ce retour était très... Direct. Une vrai cassure entre ces deux petits monde. Je n'avais pas entendu ma moitié de ce qu'il m'avait dit quand je luis avais foncé dedans. D'ailleurs, qui était coupable. Lui non plus ne pouvait-il donc pas regarder où il allait ? Je lui rendis simplement son bâton... Étrange, en m'excusant. C'était un minimum. Je lui avais ensuite demandé si son instrument de musique était cassé. Et il me répondit quelques choses qui me fit rire. Bon, je gloussais doucement, histoire de ne pas le contrarier encore plus... Ce jeune homme était un drôle de personnage, je me contentai de l'observer serrer son violon contre lui et tourner les talons... Il n'avais même pas reprit son bâton, je me devais lui rendre. Il ne me servirait à rien... D'ailleurs je me demandais bien quelle pouvait être l'utilité de cette chose, pour se promener avec... Une mode ? Non. Avec mon accident, j'avais perdu pas mal de souvenir et de connaissance. Bizarrement tout ce qui me faisait le plus peur, toutes ces histoires de maladies et de handicap avait disparu... Tout comme les personnes auxquelles je tenais. Je n'avais plus de visages, plus de voix, plus de sentiment. Juste un vide. C'est ce qui expliquait mes actions un peu... maladroites et du coup déplacées. Après quelques mètres, ils se retourna et m’engueula encore un fois. « Du calme, du calme. T'es vraiment paranoïaque ! Je veux juste te rendre ton bâton... Tu ne l'as pas repris et... Je vois pas à quoi il pourrait servir, dans la rue ou avec moi. » Je lui tendis donc son bâton. Plus je le regardais plus je me rendait compte que quelque chose n'allait pas.Je lui posais donc la question, sans indiscrétion avec une gentillesse dans la voix « Quelque chose ne va pas ? »

Du calme ? Moi ? Me calmer ? C'était une blague ?! J'allais sûrement me faire exploser la tête par mon putain de secrétaire mais je devais me calmer. Franchement, je me disais qu'elle avait de la chance que je ne la voyais pas parce que j'aurais été capable de la tuer avec un seul regard.
Et puis quelle idiote ! La première chose que je devais faire était de rentrer chez moi et faire en sorte de me trouver un autre instrument pour mon récital. Mais avant tout, je devais reprendre mon calme. Assassiner une jeune femme, même en était aveugle, restait un crime. Mais je ne doute pas que j'aurais retrouvé la vue uniquement pour pouvoir la suffoquer entre mes doigts qui appuieraient sur sa gorge.
J'étais bien évidemment tenté de l'ignorer encore une fois, mais non. Ce serait très impoli de ma part... oui ! Parce que c'était clair que j'étais tout ce qu'il y avait poli en ce monde.

« Quelque chose ne va pas ? Nooon! Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Je suppose que tu me tend mon bâton? Mais dis-moi, qu'est-ce que j'en ferais maintenant qu'il est en morceau ? Je me trainerais par terre le tenant par un bout brisé ? Au moins, de cette manière, je ne risquerais pas de buter sur quelque chose. C'est comme mon violon ? Je pourrais aussi en prendre un morceau et jouer une une unique moitié de Vivaldi ! »

Je soufflais un grand coup et fermais les yeux. Cette histoire allait certainement me rendre dingue. Dire que tout allait bien au départ. Si il n'y avait pas eu cette petite...garce !
Le Resort n'avait-il pas un service de sécurité pour les personnalités ?! J'allais devoir soumettre ce problème au conseil très prochainement. Je ne veux pas me retrouver face à ce genre de personne dans le futur oooh non. Très peu pour moi.

Depuis que j'étais arrivée, je n'avais pas réellement fais de mauvaise rencontres... M'enfin, ce jeune homme faisait à présent l'exception. Je n'aimais pas me prendre la tête dès le matin... Je commençais légèrement à perdre patience, ce qui ne me ressemblait pas. Je respirais donc à fond, histoire de contenir ma petite colère. Si vraiment il continuait de se comporter de cette façon, soit comme une diva puante, je le laisserais se démerder. Bon, je sais que je m'en mordrais les doigts, mais on ne peut pas être tout le temps gentil et se faire grandement marché dessus à longueur de journée. Il y a des limites à tous les enfants. Et puis, il faisait quelques efforts pour être poli, je crois... Alors que je le suivais et lui demandais si quelque chose n'allait pas, il me répondit sur le ton de l'ironie. Je l'écoutais, toujours son putain de bâton à la main.« Accro à candide je vois. » commentai-je simplement histoire de gardé mon sang froid.

Et puis, sa phrase résonna dans ma tête. Il ne voyait rien ? Il était aveugle ? Ah, comme je m'en voulais. Je me sentais un peu honteuse. Je décidais donc de prendre son poignet et y glissa son bâton dans sa main. « Comment tu peux savoir qu'il est cassé alors que tu vois rien ? Il est en parfait état... vérifie par toi même. ». Je lui lâchai ensuite le poignet. Il ne restait plus qu'à régler le problème du violon, qui en soit n'était pas tellement de ma faute. Mais je me taisais. Mieux ne valait-il pas trop en rajouter. « Pour le violon, je suis désolée. Mais ça avance à rien de s'excuser. Tu en as un de rechange ? Quelques parts pour aller le chercher ? Si c'est ce que tu veux, je le ferais, histoire d'oublier cette histoire au plus vite. j'ai pas envie qu'elle gâche plus ma journée... » parce que depuis tout à l'heure il se plaignait, tel une star, mais j'avais aussi ma part de malchance dans l'histoire. Moi aussi, bizarrement, j'aurai préféré ne pas lui rentrer dedans. Dans une personne aussi... Polie. Je soupirai doucement puis accéléra pour atteindre son niveau.

Deux solutions se présentais à moi. La première étant de lui faire avaler mon violon et de la tuer avec. La seconde option consistait à rentrer chez moi, me débarrasser des débris de ce même violon et faire comme si je ne savais pas ce qui lui était arrivé. Mais dans les deux cas, je restais on ne peut plus furieux contre cette fille qui ne semblait n'avoir aucun remords pour avoir brisé l'instrument de musique d'un musicien renommée. Gâcher sa journée ? Ah oui ? C'était la sienne que je venais de gâcher ? Et moi dans toute cette histoire hein ? C'était l'hôpital qui se foutait de la charité! Clairement.


« Un violon de rechange ? Tu crois que c'est possible de trouver le même violon ayant le même timbre en moins de... quatre heures ? »

Je rigolais doucement. Oh mon dieu. C'est qu'elle était comique la petite. A moins d'être Wonder Woman, je doutais qu'elle puisse en dégoter un, et bien sûr, il fallait qu'elle en ai les moyens, chose que je pensais impossible étant donné sa stupide question.
Je soupirais de lassitude et m'assis par terre comme un enfant qu'on venait de gronder. « A croire que les Parques se sont liguées contre moi, et ce, depuis ma naissance... »
Du bout des doigts, j'effleurais les cassures du l'instrument. Il était vraiment mal au point. Je doutais fortement que l'on puisse le réparer. A moins de trouver un artiste dans la matière. Cela aurait été vraiment dommage de le jeter, et puis, on ne jette pas les choses qui ont donné de si jolis sont auparavant. Il fallait les respecter.
Mais même si je le faisait réparer, je ne l'aurait jamais avant mon vol. Je devais donc trouver une solution logique à mon problème.
Je fermais les yeux et commençais à fredonner une petite mélodie. Cette que je comptais jouer au violon il y a quelques minutes. Il fallait que je réfléchisse et pour cela, il me fallait de la musique.
Pendant ma réflexion, j'ignorais volontairement la jeune femme, cause de tous mes malheurs.

Je le savais, je le savais très bien même. Un instrument c'est personnel, c'est même unique. Un peu comme un pinceau. Je comprenais un peu pourquoi il se mettait dans des états pareils, mais était-ce vraiment une raison pour être si désagréable ? Je ne pense pas... Mais il avait ses droits. Je ne l'écoutais que d'une oreille, il se plaignait tellement que s'en était soûlant. La situation était critique, certes, mais qu'est-ce que je pouvais faire ? Je voulais bien l'aider, il n'avait pas l'air du même avis plutôt tourné sur lui même. Mais en même temps, il devait mieux s'y connaitre que moi. Je ne saurais même pas dire où était le magasin d'instrument le plus proche, donc autant vous dire que réparer un violon était hors de ma portée. Je le regardais donc s'asseoir se plaignant une fois de plus. Il se mit à chantonner. Je le laissai faire. J'allais un peu plus loin rejoindre un banc et m'asseoir à mon tour. Je n'avais pas osé le déranger en lui demandant s'il ne voulait pas mieux être assis sur un banc, même à côté de moi, qu'à même le sol. Je le laissais chercher une solution au problème, mais ne le quitter pas pour autant. Allez savoir pourquoi j'ai toujours eu du mal à imaginer que le monde qui m'entour puisse être méchant voire même sans pitié. C'était surement possible, mais je m'en fichais, j'arrivais toujours à voir du bien en une personne. Je n'arrivais pas à lui en vouloir vraiment, ni même à le considérer comme un sale type.

J'attendis que ma colère tombe avant de reprendre la parole, alors qu'il était toujours assis par terre : « Tu ne connais pas un magasin ? Quelque chose dans le genre ? Je sais que c'est dur de se séparer de son instrument, mais je ne m'y connais pas en violon, bien que ça soit un très bel instrument. ». Je me grattais la tête puis me relevais pour revenir jusqu'à lui : « Allez, ça sert à rien de rester assis là, faut agir. Tu peux pas prévenir quelqu'un, je ne sais pas... Mais, t’apitoies pas sur ton sort, ça n’arrangera encore rien. En quatre heure... On peut en faire des chose, tu sais ? ». Je ne savais pas ce que je devais faire, le bouger... Ouais. c'est tout ce qu'il y avait à faire. Il ne fallait pas qu'il reste assis sur le trottoir comme ça, je suis sure qu'il méritait mieux que cela. L'espoir n'était pas perdu, enfin, je n'en savais rien, mais dans tous les cas, je ne le laisserai pas tout seul ici.

C'était vraiment pas possible. Elle ne pouvait vraiment pas se la fermer en fait. Impossible de réfléchir en paix ! Ce genre de nana existait vraiment ou ce n'était qu'une farce ? Un rire narquois m'échappa. J'en pouvais plus. J'aurais limite envie de pleurer. Faire quelque chose hein ? Faire quoi ? Tout était fichu maintenant. Je n'aurais pas du défier ce stupide secrétaire. Le prévenir ? Bien sûr... autant me suicider tout de suite. Si il y avait une chose à laquelle je n'étais pas prêt, c'était bien de lui dire que j'ai cassé l'instrument avec lequel je devais jouer. Mais d'un autre côté, si je l’appelais, il trouverais certainement une solution pour le faire réparer ou m'en trouver un autre. Je soupirais. Merde. C'était bien évidemment la seule chose à faire. Je devais rentrer chez moi. Oui bon, j'aurais pu l'appeler aussi pour qu'il vienne me chercher mais cela me mettrais encore plus dans la mouise. Il m'aurait sans doute attaché avec la laisse de Xander pour ramener à la maison. « Si tu veux te rendre utile, aide-moi à rentrer chez moi. Zone Ouest Résidence 6125, s'il te plait. Pus vite j'y serais et plus vite je serais pendu. »
Je me relevais lentement, faisant bien attention à ne pas endommager le violon plus qu'il ne l'était déjà.
Je me figeais soudain. « Merder merde merde merde !». Je n'avais pas l'archet. C'était bien mon jour. Vraiment. Voilà. C'était le moment où je commençait vraiment à paniquer. Il me manquait mon archet. Et je ne pouvais pas le chercher puisque je ne voyais. Là, c'en était trop. Mon quota émotionnel venait d'arriver à sa limite. Je n'en pouvais plus. J'inspirais un grand coup, et me mit à hurler. On aurait pu croire que j'étais fou, certes, mais je m'en battais les reins là tout de suite. J'en avait marre.
Doucement, je posais l'instrument sur le sol, le contournait, et me mit à marcher un peu plus loin tout en passant mes mains dans mes cheveux avec force. « Qu'est-ce que j'ai fait pour être aussi malchanceux aujourd'hui ? ».
Je m'arrêtais et me retournais vers l'endroit dont je venais de m'éloigner. « Excusez-moi moi mademoiselle, mais pourriez-vous regarder autour de vous et me dire si vous voyez un archet, blanc je crois ? Je crains de ne pas pouvoir le faire moi même. » Compter encore sur les gens. La chose que je détestais le plus au monde. Mais je n'avais pas vraiment le choix... je n'avais jamais le choix en fin de compte.

Enfin. Enfin nous arrivions à faire quelque chose. Il me demanda si je pouvais le conduire à une adresse : zone ouset, résidence 6125. Il me le demanda poliment, ce qui m'étonnai. J'avais l’impression d'avoir affaires avec un autre personnage. La fin de sa phrase me titillai quelque peu, mais je ne me permis aucune réflexion, autre que ma réponse : « Évidement, sans problème ! ». Il avait enfin compris que je n'attendais qu'une chose : l'aider. Je n'aurais pas pu le laisser en pleine rue, seul avec son violon cassé... Ce n'était pas humain et encore moins moi. Je ne supporte pas de voir les autres dans ma mouise, et déteste encore plus ne rien pouvoir faire, rester les bras croisés et attendre... ou pire, ignorer. Pourquoi ? Parce que j'aurais bien aimé avoir une main tendue, un bras sur lequel m'accrocher lorsque je me suis réveillée. Mais malheureusement, mes amis proches m'ont fuis, mes parents me mentent... Alors, en dépit d'avoir cette main, je tends la mienne.

Il se relava alors que je me rapprochais de lui. Je ne savais pas si il fallait le prendre par le bras où l'aider, le guider. J'en savais fichtrement rien ! Et ça m'énervait. J'allais devoir passer pour une conne une fois de plus en lui posant une question débile. C'est vrai, pas mal de gens, surtout de mon âge, devait savoir COMMENT FAIRE, mais pas moi. C'était.... Nouveau, oui, nouveau comme situation. Il se mit soudainement à hurler ce qui me fit sursauté et me sortis de mes pensées, vitesse grand v. Il recommençait à se plaindre. Je l'écoutais en essayant de comprendre ce qu'il se passait. Tout aussi poliment, il me demanda de trouver un archet, blanc à priori. Je regardai autour de moi... Un archet, ça ne devait pas souvent traîner dans les rues, non ? Je le vis, non loin de nous, fis quelques pas, l'attrapai et lui assurai que je venais de trouver son archet. Je reviens vers lui et le posai dans sa main : « Trouvé ! Un problème en moins, non ? ». Je sais qu'il ne me voyais pas, mais... j’espérais qu'il sentait dans le fond de ma voix que je souriais. « Direction ta résidence maintenant. Est... Est-ce qu'il faut que je t'aide pour avancer ? Que je te prenne par la bras ou... Enfin tu l'as compris, dis moi ce qu'il faut et j'ferais tout mon possible. ». Me plier en quatre pour les autres, comme toujours.

Un sentiment de soulagement me traversa lorsque je sentis l’archet dans ma main. Je le touchais afin de bien vérifier qu’il ne lui était rien arrivé. Juste pour être sûr. Après ce qui venait de se passer, j’avais toutes les raisons de croire qu’une autre couille pouvait m’arriver.
Je tournais la tête dans la direction du danger ambulant et m’appliquais à lui sourire. Qu’importe qu’il soit sincère ou non, l’important c’était de le paraître. Après tout, je ne la connaissais pas et elle avait cassé mon précieux violon. Je n’avais pas à être gentil avec elle, mais j’avais besoin de son aide pour vite rentrer chez moi, me faire tuer et par la suite arrêter ma carrière parce qu’aurais tous les membres brisés. Voilà. C’était le topos. Cool. Super. Génial. Funeste.
« Le mieux serait en effet que vous me teniez par le bras, mais je ne suis pas très sûr d’apprécier votre contact après la mésaventure que vous venez de me causer. » Le tout dit avec la plus délicieuse amabilité. Il fallait être honnête, hein. Elle était la cause de tous mes malheurs de la journée. « Oh... et si vous pouviez ramasser le violon, ce serait vraiment très aimable de votre part. Peut-être pensez-vous que je vous demande beaucoup, mais dans l’état actuel des choses, c’est on ne peut plus justifié. »Oui. J’étais toujours en colère, mais au moins, j’étais redevenu poli. Elle n’allait pas en demander plus non ? Pff... comme si elle en avait le droit de toute façon. Et intérieurement, je lui souhaitais de ne pas relever car je comptais bien l’achever si jamais elle osait. Qu’on le sache, un aimable Jae Jin est beaucoup plus supportable qu’un Jae Jin en colère.
Je n’attendais pas qu’elle me donne le violon et commençait à marcher dans la direction que j’avais emprunté plus tôt. Le bon chemin vers la maison de mon futur décès. Je faisais très attention à l’archet, maigre relique d’un instrument jadis prestigieux.